Aujourd’hui , c’est l’anniversaire d’Yvonne, l’une de mes huit petites filles : elle a 16 ans, elle est belle et un peu mystérieuse, comme un « pré-raphaélite »…
La semaine dernière, je n’ai pas eu le courage de regarder l’émission de télévision de Serge Klarsfeld et sa femme sur la traque des nazis. Pourtant, j’ai bien connu Serge alors que nous faisions ensemble une licence d’histoire à la Sorbonne et j’ai une immense estime pour lui, sa
grande honnêteté, son courage indéfectible.
En revanche, quelques jours plus tard je me suis arrêtée sur un programme intitulé « Le courage du désespoir », diffusé par Arte et qui rendait hommage à ces Juifs qui, du ghetto de Varsovie à l’enfer des camps prirent les armes pour s’opposer à la machine de mort nazie. Et j’ai vu témoigner de belles vieilles dames dignes et souriant parfois à travers leurs larmes, des messieurs à l’allure énergique… et tout à coup m’est revenu à la mémoire le grand poème d’Aragon , intitulé « Marche Française »…extrait du Recueil « La Diane Française »
Quand il arriva la saison
Des trahisons et des prisons
Quand les fontaines se troublèrent
Les larmes seules furent claires
On entendait des cris déments
Des boniments des reniements
Des hommes verts et des vautours
Vinrent obscurcir notre jour
Il nous dirent Vous aurez faim
Dans la main nous prirent le pain
Ils nous dirent Jetez vos livres
Un chien n’a que son maître à suivre
Ils nous dirent Vous aurez froid
Et mirent le pays en croix
Ils nous dirent Les yeux à terre
Il fait obéir et se taire
Ils nous dirent Tous à genoux
Les plus forts s’en iront chez nous
Ils ont jeté les uns aux bagnes
Pris les autres en Allemagne
Mais ils comptaient sans Pierre et Jean
La colère et les jeunes gens
Mais ils, comptaient sans ceux qui prirent
Le parti de vivre ou mourir
Comme le vent dans les cheveux
Comme la flamme sans le feu
Croisés non pour une aventure
Une lointaine sépulture
Mais pour le pays envahi
Contre l’envahisseur haï
Chassons chassons nos nouveaux maîtres
Les pillards les tueurs les traîtres
Le bon grain du mauvais se trie
Il faut mériter sa patrie
Chaque jardin chaque ruelle
Arrachés à des mains cruelles
Chaque silo chaque verger
Repris aux mains des étrangers
Chaque colline et chaque combe
Chaque demeure et chaque tombe
Chaque mare et ses alevins
Chaque noisette d’un ravin
Chaque mont chaque promontoire
Les prés sanglants de notre histoire
Et le ciel immense et clément
Sans nuage et sans Allemand
Il faut libérer ce qu’on aime
Soi-même soi-même soi-même
J’ai appris ce poème à l’âge de dix ans, en novembre 1945 : notre professeur, Madame Henne
était une femme remarquable et le choix de poésie qu ‘elle nous fit découvrir et apprendre pendant cette année de sixième, allait de Aragon à Péguy en passant par Colette, Baudelaire ou la Comtesse de Noailles…
jeudi 1 février 2007
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